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Le fil 1 : indispensable matériau

11 octobre 2022 -

Fil magnifique, tour de force au rouet

Quand on me demande ce qui me motive à devenir tisserande, je parle volontiers de ma passion pour le tissu comme une fin en soi. Le matériau et maintenant son élaboration me procurent chacun un équilibre, une sérénité, une sensation d’achèvement qui me font sentir chez moi dans mon atelier. Il n’y a pas une étape qui me rebute : rêver à une structure, choisir matière et couleur, élaborer un projet (avec sa cohorte de calculs : la densité, c’est la vie!!), ourdir, monter la chaîne, duiter … Et à la toute fin récolter le fruit de mes longs efforts. Mais tout cela serait impossible, je l’ai appris très vite de Betty, sans les fils appropriés. Si le fil est laid, on ne pourra pas faire un joli ouvrage. Avec le temps je m’aperçois que j’ai développé la même fascination pour les fibres que celle qui m ‘animait depuis longtemps déjà pour les tissus.

Le fil est un miracle en soi. Une agrégation de fibres éparses et de longueur variable que l’on réunit en les tordant, et qui permet ainsi d’obtenir un objet virtuellement infini. Il y a de quoi s’interroger : comment est venue l’idée aux premières fileuses de récupérer la laine de leurs bêtes, de la prendre à poignées et d’en faire un tortillon ? Quelles petites curieuses gâchi-tophobes se sont suffisamment penchées sur ces rebuts pour deviner, tâtonner, bidouiller jusqu’à composer cette succession d’opérations qui aboutissent à l’élaboration d’une pelote ? Ca me rend un peu perplexe, beaucoup envieuse de cet esprit créatif-là qui permet à l’humanité toute entière d’avoir moins froid la nuit et l’hiver.

L’idée du fil est en elle-même un objet de curiosité. Il provient pour bonne partie de manipulations peu intuitives sur du matériau brut, animal ou végétal. Ayant vu un morceau de documentaire sur une tradition japonaise autour du tissage de la fibre d’ortie, la ramie, je me suis penchée sur sa transformation. Je n’ai pas été déçue ! Cueillir, éplucher, laisser sécher (on appelle ça rouissage), faire bouillir avec de la cendre, rincer, puis re-sécher, filer enfin. Si ça vous amuse d’ailleurs, vous pouvez tenter l’expérience. Il y a des tutoriels qui dédramatisent l’opération (par exemple celui-ci : https://wiki.lowtechlab.org/wiki/Extraction_de_la_fibre_d%27ortie). On retrouve ces différentes étapes pour le lin et le chanvre, et il y en a d’autres pour la soie. On est loin d’une fabrication évidente, tout de même. Pour ma part, je laisse ces tentatives à d’autres. Il y a des personnes qui font ça très bien, et même magnifiquement.

Bart et Francis – Cash bling bling

Citons aussi les bidouilleurs qui créent du fil avec ce qui leur tombe sous la main. Pour ce-lles-ux qui ne connaissent pas, je ne citerai que les préférés de bien des artisserand-e-s : Bart et Francis. Ces deux olibrius belges valent le détour, et leur boutique est un piège financier. Je vous engage à aller faire un tour sur leur site. Il font des promos régulièrement, de quoi craquer à des prix abordables pour des créations ébouriffantes que vous ne trouverez nulle part ailleurs : Bart et Francis

Enfin, nous avons d’autres chouchous chez Artissage. Dans une prochaine note, cap sur la Creuse et une filature que nous adorons : Fonty.

Margodric